Conte Moderne

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Conte Moderne / Short-Edition

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Conte moderne : la gentille famille et le méchant banquier

Il était une fois une gentille famille qui vivait dans une jolie petite maison. A la fin de chaque mois, le gentil papa apportait à la banque l’argent qu’il avait gagné en travaillant, pendant que la gentille maman restait à la maison pour s’occuper de leurs trois gentils enfants.

La gentille famille vivait correctement, n’était pas dans le besoin, mais pas dans l’opulence non plus. Ce que le gentil papa gagnait chaque mois suffisait juste à couvrir les dépenses du ménage. Quand une dépense imprévue était nécessaire, le gentil papa ou la gentille maman téléphonait très vite à la gentille banquière pour la prévenir, et ensemble ils trouvaient une solution afin que personne ne fût pris au dépourvu. La gentille banquière, qui était une vieille dame pleine d’expérience, avait d’ailleurs autorisé la gentille famille à dépenser à l’avance un peu de l’argent qu’ils gagneraient le mois suivant. Ensemble, ils avaient convenu de combien l’autorisation était nécessaire, et comme la gentille banquière était intelligente et expérimentée, et que la somme avait correctement été évaluée, la gentille famille ne dépassait jamais ce montant.

La gentille famille vivait donc heureuse et sans soucis dans sa jolie petite maison, jusqu’au jour où la gentille banquière décida qu’elle était trop vieille pour continuer à travailler à la banque, et qu’il était grand temps de la quitter pour consacrer son temps désormais libre à ses petits enfants et à son potager.

Dans les jours qui suivirent, un jeune banquier fut désigné pour prendre la place de la gentille banquière.

La gentille famille n’était pas inquiète : le nouveau banquier, si jeune, inexpérimenté et pourtant ambitieux qu’il fut, avait certainement été à bonne école avec la gentille banquière, et elle décida de lui accorder sa confiance, comme elle l’avait accordé pendant des années à la gentille banquière.

Pourtant, très vite, le jeune banquier décida que l’autorisation que la gentille banquière avait accordée à la gentille famille était bien trop importante, et la réduisit du jour au lendemain à moins de la moitié de son montant.

La gentille maman et le gentil papa protestèrent immédiatement, en expliquant au banquier que comme ils avaient pris l’habitude d’utiliser cette autorisation, il leur était impossible de rembourser d’un seul coup le petit retard que cela représentait, et que si le banquier persistait dans sa décision, le nouveau montant serait forcément dépassé…

« Vous n’avez qu’à faire attention à vos dépenses ! » leur dit le banquier.

Mais la gentille famille faisait déjà très attention à ses dépenses, elle avait pris l’habitude d’être très raisonnable, et la sentence du jeune banquier résonnait à leurs oreilles comme une insulte.

Ce qui n’était jamais arrivé arriva donc : la gentille famille dépassa son autorisation de découvert.

Le méchant banquier téléphona à la gentille maman pour la gronder très fort et lui dit :

« Puisque vous avez fait fi de mon interdiction, et que vous avez malgré tout dépassé le découvert qui vous était autorisé, je vais vous punir. Et votre punition sera la suivante : je garderai pour moi une partie de l’argent que le gentil papa a gagné en travaillant !

– Mais vous ne pouvez pas nous faire ça, dit la gentille maman, si vous nous prenez cet argent, il nous manquera pour payer les dépenses du ménage, et nous dépasserons encore notre autorisation le mois prochain, et même plus que ce mois-ci, puisque notre budget est si juste qu’il ne peut absorber une dépense supplémentaire !

– Eh bien tant pis pour vous ! Si vous dépassez, vous serez puni à nouveau, et si vous n’êtes pas capable de contrôler vos dépenses, je le ferai à votre place ! »

Le gentil papa téléphona à son tour au méchant banquier, en lui expliquant qu’il suffirait juste de rétablir l’autorisation au montant initial, et qu’il n’y aurait plus jamais aucun dépassement… Il eut beau supplier, justifier de ses revenus qui étaient au demeurant bien supérieurs au premier découvert autorisé, et donc parfaitement à même de le rembourser chaque mois, rien n’y fit. Le méchant banquier ne voulait rien entendre.

Le mois suivant, l’autorisation fut dépassée à nouveau. Un jour, le gentil papa, qui travaillait très loin de sa jolie maison, eut besoin de mettre de l’essence dans sa voiture. Lorsqu’il voulut payer à l’aide de sa carte bancaire, la machine la lui refusa. Le méchant banquier avait mis sa menace à exécution : il contrôlait les dépenses de la gentille famille.

Ce soir-là ; la gentille maman et les trois gentils enfants dînèrent tristement sans le gentil papa dans leur jolie petite maison. Le gentil papa, n’ayant pas de quoi acheter de carburant, n’avait pu rentrer chez lui.

Les jours qui suivirent, le gentil papa ne travailla pas. Sans essence dans sa voiture, il lui était impossible de rendre visite à ses clients. Le mois suivant, comme il n’avait pas travaillé, il n’eût pas de salaire à déposer à la banque.

Le méchant banquier avait privé le gentil papa de tout moyen de gagner de l’argent et de rembourser la banque. Chaque mois, le méchant banquier faisait les comptes, et appliquait les punitions. Les sommes que devait la gentille famille au méchant banquier devinrent impossibles à rembourser.

Aussi, le méchant banquier se remboursa sur la seule chose que la gentille famille possédait. La jolie petite maison.

La gentille petite famille mourut de froid et de faim.

Et…

Il était une fois un méchant banquier qui vivait dans une jolie petite maison.

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